Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 12.djvu/154

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La première fois que ce prince fait l’honneur à un de ses sujets de manger chez lui, il lui fait un présent, digne ordinairement d’un grand monarque ; mais ce qu’il donne n’approche point de ce qu’il fait dépenser. La moindre faveur qui vient de sa main, par exemple une pièce de gibier de sa chasse, jette le seigneur qui la reçoit dans des profusions incroyables.

Ces monarques veillent sans relâche à tenir les grands dans la dépendance où ils les ont réduits. Ils démembrent leurs petits états pour les affaiblir ; ils font jouer toutes sortes de ressorts pour être instruits de leurs desseins, et pour rompre leurs liaisons. Ils font les mariages de tous ceux qui composent leur cour. Les femmes que l’on tient ainsi de la main du souverain sont traitées avec beaucoup de distinction. On leur bâtit des palais, on leur donne une maison nombreuse. Les filles que l’on met auprès d’elles sont choisies avec un soin extrême, et servent avec beaucoup de modestie et d’adresse. On les divise par troupe de seize, chacune sous une dame qui la commande ; et ces troupes servent tour à tour. Elles sont distinguées par la couleur de leurs habits. Les filles, qui sont des meilleures maisons du pays, s’engagent pour quinze ou vingt ans, et plusieurs pour toute leur vie. On les prend ordinairement fort jeunes ; et, lorsqu’elles ont rempli leur engagement, on les marie suivant leur condition.

Chaque ville impériale a deux gouverneurs