Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 12.djvu/275

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des commencèrent à se rassurer contre cette crainte. Le lendemain, trois petits oiseaux firent entendre leur ramage autour des vaisseaux, et ne cessèrent point de chanter jusqu’au soir. Quelle apparence qu’ils fussent capables d’un long vol ! on fut porté à se persuader qu’ils ne pouvaient être partis de bien loin ; l’herbe devenait plus épaisse, et se trouvait mêlée de limon : si c’était un sujet d’inquiétude pour la sûreté des caravelles, qui en étaient quelquefois arrêtées, on concluait du moins qu’on approchait de la terre. Le 21, on vit une baleine, et le jour suivant quelques oiseaux ; pendant trois autres jours, un vent de sud-est causa beaucoup de chagrin à l’amiral ; il affecta néanmoins de s’en applaudir comme d’une faveur du ciel. Ces petits artifices étaient continuellement nécessaires pour calmer l’esprit de ses gens, dont la confiance diminuait tous les jours : heureusement il s’éleva le 23 un vent d’est-nord-est qui le remit dans la route qu’il voulait suivre. On continua de voir plusieurs oiseaux de différentes espèces, et même des tourterelles qui venaient de l’occident.

Cependant la navigation avait duré trois semaines, et les apparences n’étant pas changées, on ne se croyait pas plus avancé que le premier jour. Cette réflexion, jointe à la crainte qu’un vent qui avait toujours été favorable pour aller à l’ouest ne rendît le retour impossible en Espagne, produisit tout d’un coup une révolution surprenante ; la plupart furent pénétrés de