Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 12.djvu/278

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y en avait cinq cent quatre-vingt-quatre. Chaque jour de la semaine offrit de nouveaux signes. Le 8, au lever du soleil, on crut voir une terre ; et la petite caravelle, qui s’était plus avancée que les autres, tira un coup de canon avec d’autres marques de joie ; mais on reconnut encore que c’était une erreur causée par quelques nuages : les murmures et la mutinerie recommencèrent. L’amiral se vit plus en danger que jamais par le désespoir de ceux à qui les horreurs d’une mort prochaine, qui leur paraissait inévitable par la faim ou le naufrage, faisaient oublier les lois de l’honneur et de leur engagement. Les Pinçon mêmes ne firent pas difficulté de se déclarer pour les mutins. Enfin la évolte devint si générale, que, n’espérant plus rien de la sévérité ni de la douceur, Colomb prit le parti de faire aux plus furieux une proposition qui suspendit aussitôt leurs emportemens. Il leur promit que, si dans trois jours la terre ne paraissait point, il reconnaîtrait qu’il les avait trompés, et qu’il s’abandonnerait volontairement à leur vengeance. Cette déclaration les toucha ; mais ils jurèrent aussi que, s’ils ne voyaient rien de certain après les trois jours, ils reprendraient la route de l’Europe. On a toujours été persuadé qu’il avait couru peu de risques à prendre un terme si court. Depuis quelque temps il trouvait fond avec la sonde, et la qualité du sable ou de la vase devait lui faire juger qu’il approchait réellement de la terre : on ne peut douter non plus qu’il ne