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chose. » C’est ainsi qu’ils ont appelé les Russes Brichtatin, ou gens de feu, parce qu’ils ont des armes à feu. Cette dénomination leur paraissait d’autant plus juste, que, ne connaissant point les usages et les effets de ces armes, ils croyaient que le feu était produit par le souffle des Russes, et non par le fusil. C’est dans le même esprit d’analogie qu’ils appellent le pain brichtatin augtch, c’est-à-dire la racine ou la sarana des hommes qui vomissent le feu. Quand ils ne connaissent pas assez une chose pour lui trouver dans leur langue un nom convenable ou analogue à ses propriétés, ils empruntent un nom de quelque langue étrangère, sans s’embarrasser si c’est le nom véritable de ce qu’ils veulent désigner. « Par exemple, ils appellent un prêtre bogbog, vraisemblablement parce qu’ils lui entendent souvent prononcer le mot bog, qui signifie Dieu. » Au reste, ce ne serait pas la première fois qu’on aurait confondu le prêtre avec la Divinité, non-seulement dans le nom, mais dans le culte même. En général, les Kamtchadales, comme tous les peuples sauvages ou policés, quand ils ignorent le nom d’une chose étrangère, en cherchent un dans leur propre langue ; et s’ils trouvent un rapport frappant de quelque faculté ou propriété sensible entre deux êtres d’une nature très-différente, ils ne manqueront pas de leur donner le même nom. C’est ainsi qu’ils appellent un diacre un kianghich ; c’est le nom d’un canard marin, qui