Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 12.djvu/91

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et de religion. On les engage par ce serment, qui se renouvelle chaque année, à s’observer et à se trahir mutuellement ; mais quelque grandes que soient ces difficultés, elles ne sont pas insurmontables. En premier lieu, cette nation respecte peu les sermens qu’elle a prêtés au nom de certains dieux ou esprits, que plusieurs n’adorent point, et que la plupart ignorent. La crainte du supplice est ordinairement le seul motif qui les arrête. D’un autre côté, si l’on met à part l’orgueil et l’humeur guerrière des Japonais, ils sont civils, polis, curieux autant qu’aucune nation de l’univers, aimant le commerce et la familiarité des étrangers, et souhaitant avec passion d’apprendre leurs histoires, leurs arts et leurs sciences ; mais, comme nous ne sommes que des marchands qu’ils placent au dernier rang des hommes, et que d’ailleurs l’extrême contrainte dans laquelle on nous tient ne peut guère leur inspirer que de la jalousie et de la défiance, nous ne pouvons nous concilier leur amitié que par notre libéralité, par notre complaisance, et par tout ce qui est capable de flatter leur vanité. C’est ainsi que j’acquis plus de faveur auprès de nos interprètes et des officiers qui venaient chaque jour chez nous, que personne n’avait pu en avoir depuis les règlemens auxquels nous sommes assujettis. En leur donnant des conseils comme médecin, des leçons d’astronomie et de mathématiques, des cordiaux et des liqueurs de l’Europe, je pouvais