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DE LA VERTU DES PAY. II. PART.


En effet, je ne crois pas, qu’on les doive rapporter à autre choſe, qu’à cette figure qui étoit l’ornement continuel de tous ſes propos. C’eſt l’Ironie ou l’innocente raillerie qui lui plaiſoit ſi fort, comme tous ſes entretiens en font foi, qu’il s’en voulut ſervir même en mourant. Il dit donc en ce dernier acceſſoire, qu’il devoit un coq à Eſculape le Dieu des Remedes, pour ſignifier qu’il ſe voioit aux termes d’être bientôt gueri de tous ſes maux. L’action de Seneque, étant près de ſa fin, reçoit à mon jugement la même explication. Tacite remarque[1], qu’entrant dans le bain, qui aida à faire ce que le poiſon n’avoit pû executer, ce grand homme jetta de l’eau ſur ſes ſerviteurs qui étoient les plus proches de lui, ajoûtant ces belles paroles, qu’il offroit en forme de ſacrifice cette liqueur à Jupiter, ſurnommé le Liberateur. Je tiens pour aſſuré, que Socrate & Seneque n’ont voulu témoigner autre choſe par leurs derniers propos, qu’un remerciment qu’ils faiſoient à Dieu de ce qu’il les tiroit des peines de ce monde. Sur tout il n’y a point d’apparence, de prendre ceux du premier ſi ſort au pis, non plus que ſes ſermens ordinaires par le chien, par la pierre, ou par le platane, dont il ſe ſervoit exprès pour ſe mo-

  1. Lib. 25. Annal.