Page:La Révolution surréaliste, n03, 1925.djvu/14

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L’AMOUR DES HEURES, LA HAINE DU POIVRE Un clou, deux clous, trois clous et voici notre maison bâtie. Devant elle se dresse une épée de sucre qui, sous l’influence d’un rayon de soleil, tend à devenir un mondenouveau, une planète de feuillessèchesdont le désir de rotation autour d’un couple de hérons, se manifeste pas un léger . hululement qui est le signal du départ pour les 48 coureurs engagés dans la course de Paris à l’étoile polaire en passant par tous les nouveaux cinémas des capitales européennes. Les voici partis ; mais, tandis que dans les coursesque nous voyons de temps à autre dans les forêts de sel, les coureurs disparaissent,un à un comme des gouttes de rosée, cette fois-ci ils se multiplient à mesure que croit:la distance qui les sépare de leur point de départ, sans que, pour cela, diminue celle qui les sépare de leur but. Et voici que, maintenant, leur taille devient de plus en plus élevée,si bien qu’on ne tarde pas à les confondre avec les monuments publies, puis avec les arbres des forêts, puis avec les falaiseset les montagnes, puis avec l’ombre des montagnes et les voici disparus. Ils ne sont pas morts comme on pourrait le croire, mais ils sont devenus les cinqdoigts de ma main qui écrit VÉROLEà l’usage de mes contemporains.Ceux-cin’en sont pas surpris car ils savent quel usage les architectes font de la vérole, mais moi qui l’ignore je suis obligé d’attendre l’arrivée de Nestor qui répand devant moi les trésors de son intelligence sous forme de dragées rempliesde fourmis, lesquellesn’ont rien de plus pressé que de sortir de leur abri pour dévorer ma chaussure, neuve par la grâce de Dieu.

Eh bien, Nestor, qu’attends-tu pour me parier de la vérole ?

Nestor.

Un jour que je contemplais, avec

toute l’attention qui convient,à un pareil examen, une porte-fenêtre qui s’agitait faiblement sous la poussée du parfum des roses tapissant un parterre voisin, je vis la vitre se couvrir d’inscriptions chinoisesque je ne comprenaispas. Un chien aboya si près de moi que mon fauteuil fondit sous moi comme si l’émotion lui avait coupé les jambes et je me trouvai étendu sur le dos — comme un hanneton — au milieu d’une tarte aux abricots qui s’attendait à un tout autre accueil de ma part et se vengea cle mon inconvenance en me lançant au visage un jet de sulfate de cuivre, en sorte que je fus obligé de tenir, pendant un laps cle temps que je puis éva’uer à. cinq années au moins, le rôle d’un cep de vigne atteint de phylloxéra. Je n’en fus pas plus satisfait que cela et manifestai hautement mon mécontentement en m’obslinanl à produire des haricots verts sautés au lieu du raisin qu’on attendait de moi.

Au bout de cinq ans donc, une ancre de marine tombant près de moi sur un champignon qui ne survécut pas à cet accident, me rendit ma forme humaine, non sans la modifiersensiblement ; par exemple,je n’avais plus que quatre orteils à chaque pied ; par contre j’avais trois testicules dont un, celui du milieu, qui avait la l’orme,la couleur et les dimensionsd’une framboise. C’est alors que l’idée de la vérole se présenta à mon esprit : un dé à jouer dont le chiffre :-: seul était visible se planta devant mes yeux avec l’intention de s’y maintenir envers et contre tous. Néanmoins,vous devezbien penser que la volonté d’un dé à jouer ne compte pas devant celle d’un homme que n’effraye aucun péril, même pas l’idée d’un lacet de chaussure tournant au-dessus de sa. tfitc à la vitesse de 75 noeuds à l’heure. En un clin d’oeil, je lis de ce dé la paupière du macaroni. Mais, je vous le demande,que restcra-t -ildes paupièresdu macaroni et. même du macaroni lorsque les pluies d’hiver et les vents de l’univers auront décoloré son visage ? Peut-être n’en subsistcra-t -il même pas une graine de plafond! Et alors, que voulez-vousqu’il advienne des rochers de céramique qui marquent l’entrée des forteressesoù