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ce qu’ils venaient d’entendre. Cette incohérence de Giovanni les effraya tellement qu’ils restèrent muets et sans mouvement. L’arrivée d’un nouveau personnage les tira de leur stupeur. C’était le grand-écuyer.

— Frère Ambroise est en ces lieux.

— Que Votre Altesse soit la bien venue, reprit le moine, elle va nous aider à rendre la raison à ce pauvre Giovanni.

Frère Ambroise raconta alors ce qui venait d’arriver au prince Stiliagno.

— Cette tête est bien ardente, mon frère ; il y a dans Giovanni le germe de bien grandes passions. Hélas ! le pauvre enfant, les nobles facultés qu’il a reçues serviront peut-être à son infortune.

— C’est le malheur des grandes âmes, mon prince ; il faut suivre la voix qui nous dit : Marche.

— Frère, il est terrible d’être obligé de l’arrêter.

— Je crois au génie.

— Vous avez encore des illusions.

Ces quelques mots avaient été échangés entre le supérieur et le prince Stiliagno.

Peu d’instants après, le grand-écuyer, le religieux et Cécilia quittaient la maison du tailleur.

Frère Ambroise dit à part à Ninetta et à Ludovic :

— L’enfant part à minuit.

À minuit ! répondirent tristement les deux époux.

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La lune se levait derrière la montagne ; son grand disque échancré jetait de vaporeuses lueurs sur les mousses veloutées qui se laissaient dérober les parfums des craintives violettes par les sylphes nocturnes. Le calme et le silence écoutaient les dernières notes du chant du soir, et les voluptueux