tactique, je le vis se tourner vers l’archiduc Charles, qui se trouvait placé à côté de lui :
— M. l’archiduc, lui dit-il, à demi-voix, que pensez-vous de l’habileté de cette puce ? Cet animal, tout petit qu’il est, pourrait servir d’exemple à plus d’un général. Il ne perdra pas sa bataille de Wagram, lui !…
À ce reproche sanglant, l’archiduc se mordit les lèvres avec dépit, et si le respect ou la crainte ne l’eût retenu, il eût pu s’oublier envers son Empereur. Il fut plus prudent ; il se retira.
Cette brusque sortie intrigua la plupart des spectateurs qui n’en connaissaient pas la cause, de sorte que l’attention qu’on nous avait prêtée d’abord s’affaiblit sensiblement. L’Empereur lui-même, chez qui des souvenirs pénibles venaient de se faire jour, indiqua, par un signe, à l’industriel qu’il était content, et que nous pouvions cesser nos évolutions ; en même temps, il se leva et disparut. La belle archiduchesse se disposa à le suivre, mais auparavant, elle voulut jeter un dernier coup-d’œil sur notre petit bataillon, et elle vint se pencher tout près de nous sur la petite table où nous finissions d’exécuter nos manœuvres. — À l’instant, ma mère accourut à moi avec toute l’ardeur que put lui permettre son âge, et me souflla rapidement quelques mots à l’oreille. Je la compris, et soudain nous primes notre élan. — Une seconde ne s’était pas écoulée que déjà nous étions attachées à la personne de Marie-Louise, littéralement parlant.
Le but de mon engagement dans la troupe de l’industriel était parfaitement rempli ; mon corps jouissait d’une santé florissante et d’une admirable vigueur ; mes jarrets avaient contracté une souplesse merveilleuse ; je connaissais tous les mille et un petits secrets d’attaque et de défense ; mon éducation était finie. Dès lors, nous n’avions plus rien à faire dans cette société généralement grossière et fort ennuyeuse. D’ailleurs,
