dans la rue avec La Fontaine. Molière salue le roi, et voilà qu’entre lui et le monarque la conversation s’engage ; causerie familière et spirituelle, qu’amène une aimable et douce liberté. Le poète demande compte au roi de la présence en ces lieux de ce nouveau visiteur, et le roi de lui conter l’histoire du savetier, en riant aux éclats et en s’appuyant familièrement sur l’épaule de son célébre ami. Grégoire observait sans mot dire ce curieux tête-à-tête ; tout-à-coup, il rompt le silence et s’adressant au monarque : Sire, dit-il, je ferai pour vous ce que vous demandez. Et comment cela, répartit le roi étonné, maître Grégoire, je te croyais philosophe ; mais en vérité après tes paroles, il me semble entendre la nouvelle philosophie murmurer tout bas et regretter un peu l’échoppe. Oui, Sire, elle la regrette, interrompit le riant savetier, car elle veut l’orner d’une nouvelle figure, de la vôtre, Sire, et s’il plaît à Dieu, ce sera moi qui ferai son office, tout indigne que j’en suis. Je vous représenterai, non plus au milieu des courtisans ; mais ainsi appuyé sur l’épaule du fils de maître Poquelin, et causant avec lui comme avec un égal. Cela fera rire les uns et pourra faire penser quelques autres ; qu’en dites-vous, l’idée n’est-elle pas bonne ?
Le bonhomme allait continuer, mais il s’arrêta pour saisir la main de Molière, qui d’un bras serrait Louis XIV et de l’autre tendait la main au pauvre savetier. Ainsi, Grégoire fut presque fêté ; lui aussi il eut son petit quart-d’heure au Louvre ; et quand il quitta le palais pour retourner à l’échoppe, il ne parut ni plus ni moins content que quand il y était entré : car je vous l’ai dit ; Grégoire était philosophe. Il se mit à l’œuvre et griffonna tout bonnement à côté de M. le Curé la figure du grand Louis XIV appuyé sur l’épaule du poète et causant avec lui. L’image était grossière, mais pleine de vérité et d’expression ; et dans cette ébauche imparfaite,
