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Le surveillant regarda l’étourdi Napolitain qui déguisait mal son envie de rire.

Votre politesse est un peu suspecte, et quant à vous donner des avis, je ne m’en croyais pas digne, reprit ironiquement Pistochi, mais cependant…

— Ah ! c’est que je voudrais traiter en contre-point sévère l’Ave Maris Stella.

— Insolent.

— Le fou Logroscino s’échappa en éclatant.

Pour Pistochi, son extrême rudesse, le peu d’aménité de son caractère lui firent exagérer ce qui n’était qu’une malice d’écolier ; il prit en aversion le premier auteur de ce qu’il appelait sa honte.

Les années se passent vite, même au Conservatoire, et déjà deux s’étaient écoulées, pour l’orphelin. Cette vie laborieuse, cette existence de cénobite, n’avaient fait qu’augmenter le penchant à la mélancolie qui dominait Giovanni ; il n’avait qu’un ami, Logroscino ; mais en revanche sa supériorité lui avait fait des rivaux, qui sous un masque bienveillant cachaient leur jalousie. Pour Pistochi, sa haine s’était augmentée de plus en plus ; à tous les concours, le Calabrais avait emporté les suffrages, et les talents de l’élève importunaient le vieil italien ; il n’était de tracasserie qu’il n’employât pour tourmenter l’objet de son ressentiment. La moindre infraction à la règle était pour lui l’objet de satisfaire son âme, mais un événement imprévu l’éloigna de Giovanni.

Nous l’avons dit, il y avait déjà deux années que l’orphelin de Cassoria avait quitté le toit paternel. De temps à autre, il recevait des lettres de frère Ambroise, et le matin même du 1er mai 1719 le religieux lui écrivait comme suit :