Page:La Variété, revue littéraire, 1840-1841.djvu/358

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— Viendra-t-il ? Le temps est expiré, et nul bruit ne m’annonce sa venue. Si je l’avais guetté, je n’éprouverais pas les tourments qui se joignent à mes maux. J’ai menti à ma haine, j’ai trompé ma vengeance ; il fallait le surprendre n’importe où : il fallait que l’acier troublât même sa prière, si cet infâme insulte Dieu en priant : car c’est une folie, un acte insénsé d’avoir agi ainsi. S’il ne se met pas à sourire de ma démence, il enverra la justice qui prendra sa partie. Double fou : je joue ma tête, sans avoir assouvi ma colère. Honte sur moi, car je suis un lâche ; je ne suis pas Italien : un meurtre m’a effrayé.

— Calmez votre repentir, signor, me voici à votre discrétion. Giovanni se trouvait face à face avec le grand-écuyer,

— Ah ! fit l’orphelin, voilà le seul bonheur que j’aie éprouvé depuis long-temps. Merci, altesse.

— Il n’y a point d’altesse, entendez-vous, jeune homme. Expliquez-vous.

— Je n’ai point besoin de vous dire mon nom.

— L’imprudence de votre conduite m’a fait vous reconnaître.

— Soit. Alors vous savez le but de notre entrevue.

— Je l’ignore complètement.

— Ma lettre vous avait dit qu’un ressentiment profond…

— Est-ce pour vous avoir évité la prison civile, que votre fuite du Conservatoire méritait ?

— Point d’ironie. Je vous hais, et ne suis pas le seul, puis-