Page:La Variété, revue littéraire, 1840-1841.djvu/58

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 54 —

paraisse une bonne méthode, un livre destiné à propager les belles traditions, pas un mot sur son auteur, c’est l’ouvrage d’un pédant ; c’est utile, cela doit être ennuyeux, C’est donc pour protester contre cette ingratitude de la presse élégante et facile que nous consacrerons quelques articles à l’étude de l’enseignement et des hommes qui s’y livrent.

Choron et son excellente méthode, voilà ce que nous allons étudier avec nos lecteurs.

Choron, ce nom seul rappelle tous les progrès que l’homme qui le porta fit faire à la musique. Destiné dans le principe à d’autres études, Choron se livra assez tard aux travaux qui l’ont illustré ; mais il y apporta des dispositions si prodigieuses et un zèle si grand, qu’il triompha de toutes les difficultés. Son esprit supérieur aperçut bientôt le vice de l’éducation musicale en France, et pour y remédier, il parcourut l’Italie et l’Allemagne, afin de connaître leurs méthodes. Ce fut dans ces voyages qu’il se passionna pour les œuvres des grands maîtres de la Renaissance.

À Rome, il admira les nobles et savantes compositions de Palestrina, Carissimi, etc. L’école napolitaine lui offrit les chef-d’œuvre de Scarlati, Leo, Porpora, Durente ; et quand ses genoux se courbèrent sur les dalles de marbre de Saint-Marc, le vieux maître de chapelle, Claude Monteverde, l’étonna par l’étrangeté de son harmonie, Ce n’étaient plus les formes idéales de l’art : il y avait quelque chose d’âpre et de sauvage. Monteverde avait ajouté à la lyre des Orphées d’Italie, la corde d’airain qui vibra plus tard avec tant de force sous la main puissante de Beethoven. Mais ce fut surtout dans la patrie de Sébastien Bach, de Handel, de Haydn, que Choron comprit dans toute leur vérité les prodiges de l’art, toute une nation s’unissant dans un même chœur pour chanter Dieu, la patrie et l’amour ; car les proportions de l’art allemand sont établies sur des bases gigantesques. La pensée qui les réalise est toujours grave et sérieuse ; elle ne traduit que les grandes impressions