Page:La Vie littéraire, I.djvu/268

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On l’a chicané sur sa philosophie ; on y a perdu son temps, il n’en a pas. Il n’est ni fataliste comme on le lui a reproché, ni providentiel. Il a dit lui-même, dans un de ses articles du National, avec la fermeté des convictions sincères : «  Il n’y a que des hommes et des passions d’hommes. » Il a dit encore : « Nous sommes tous hommes, et cette condition est dure. » Il veut que la Révolution réussisse ; il le veut à tout prix. C’est dans ce sens qu’après avoir plaint les Girondins, qui moururent pour elle, il ajoute : « On ne pourrait mettre au-dessus d’eux que celui des montagnards qui se serait décidé pour les moyens révolutionnaires par politique seule et non par l’entraînement de la haine. » Cela n’est point philosophique du tout et n’est guère moral. Que nous sommes loin ici de M. Quinet, qui se lamente dès qu’il voit la Révolution s’écarter des règles de la philosophie humanitaire ! Mais la philosophie et la morale ne sont point les parties essentielles de l’art de l’historien.

On a contesté à M. Thiers sa parfaite exactitude. On lui a reproché de confondre, à certains moments, sur la foi du Moniteur, Maximilien Robespierre et Robespierre jeune ; on lui a fait un grief de dire que Couthon, qui était cul-de-jatte, « s’élançait » à la tribune. On a relevé plusieurs erreurs dans son livre ; mais, en somme, point d’erreurs graves. Ses plus grosses fautes à cet égard ne seraient chez Michelet que des peccadilles. D’ailleurs, on ne peut écrire une histoire générale sans laisser échapper un très grand