Page:La Vie littéraire, I.djvu/374

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petite chambre de la rue Coëtlogon, le chapitre viii de l’Imitation ; s’il s’était pénétré du sens profond de ces paroles : « Ne désirez pas de paraître devant les grands… N’ayez de familiarité avec aucune femme ; » s’il avait cherché sa joie dans la tristesse et son allégresse dans le renoncement, il n’aurait pas éprouvé la pire des souffrances, la seule souffrance véritablement mauvaise, celle qui ne purifie pas mais qui souille ; et il n’aurait pas cherché à mourir de la mort des désespérés. René Vinci est un jeune homme pauvre, un poète de vingt-cinq ans, qui fit applaudir au Théâtre-Français une saynète délicieuse, un autre Passant. Le monde des étrangères et des parisiennes, les salons où l’on cause, où l’on joue la comédie, enfin ce qu’on appelle le monde, s’ouvrit soudain à sa jeune célébrité. Il s’y jeta avec une ardeur enfantine et fut séduit tout de suite par ce que Pascal appelle les grandeurs de chair. L’éclat des luxueuses existences l’éblouit. C’est peut-être qu’il n’était pas un grand philosophe. Je l’ai entendu railler à ce sujet. Il faut le plaindre plutôt. Le luxe exerce un irrésistible attrait sur les natures élégantes et délicates. Un de mes amis, né pauvre comme René Vinci, fut admis pareillement, à son heure, dans le concile des riches et des puissants. Il regarda leur luxe d’un œil paisible et froid. Comme je l’en félicitais, il me répondit : « J’avais fréquenté le Louvre et vu des cathédrales avant d’aller dans des salons. » Mais je ne dois pas citer mon ami comme un exemple : il a un grand