Page:La Vie littéraire, II.djvu/214

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a dans ce monde un adversaire à sa taille : le hasard. Le hasard, la fatalité se mit dans plusieurs circonstances décisives du côté des alliés. Du moins le grand capitaine espéra jusqu’au bout et ne négligea rien pour rappeler la fortune.

La troisième partie de la campagne, le grand mouvement sur la Lorraine, est d’une hardiesse inouïe. Napoléon, découvrant audacieusement Paris, se jetait sur les derrières des armées alliées ; il rappelait à lui les garnisons françaises du Rhin, puis avec son armée ainsi doublée, il coupait l’ennemi de ses bases d’opérations. Un moment les états-majors des alliés se crurent perdus.

Au conseil de guerre de Pougy, le 23 mars, il fut question de battre en retraite. « Le mouvement général de Napoléon sur Saint-Dizier, dit très bien M. Henry Houssaye, admirable dans la conception, est justifié dans la pratique par cela seul qu’il inspira un instant aux alliés l’idée d’une retraite sur le Rhin. » Cette admirable manœuvre allait réussir, c’était la victoire, c’était le salut, quand les alliés apprirent par des courriers tombés entre leurs mains et par des émissaires de Talleyrand que la trahison les attendait, les appelait à Paris. Ils y marchèrent. Mais avec quelles craintes ! Depuis leur entrée sur la terre de France, ils n’avaient pas cessé de trembler et leur peur augmentait avec leurs progrès sur le sol défendu par Napoléon et les paysans. Le 3 avril, quand l’empereur, à Fontainebleau, n’avait plus qu’un tronçon d’épée et une poignée d’hommes, ils tremblaient encore : « Ce terrible Napoléon, dit l’émigré