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fin de roman

quand ça leur plaît. Je n’ai pas à surveiller leur départ. Je ne peux les garder contre leur gré. Ils s’en vont quand ils le veulent. Ils ne sont pas prisonniers. Puis, quand on a six cent quatre piastres dans sa poche, on n’amène pas dans sa chambre une femme qu’on ne connaît pas.

M. Petipas sentait que l’homme avait raison. C’était justement cela qui l’exaspérait. Il avait agi stupidement, il reconnaissait son tort mais il aurait voulu pouvoir rejeter sur un autre le blâme pour le malheur qui lui arrivait.

— Alors, dit-il, je vais téléphoner à la police.

Le patron était mécontent. Ces histoires de vols qui paraissaient ensuite dans les journaux jetaient du discrédit sur son établissement. Cependant, il ne pouvait refuser la requête de son client.

Le policier qui reçut la communication informa M. Petipas qu’il devrait se rendre au poste pour faire sa plainte. Dans l’occurrence, le malheureux volé dut emprunter un vieux pantalon au patron pour sortir.

Les jours s’écoulèrent et M. Petipas n’eut pas de nouvelles de son argent ni de la belle qui le lui avait chipé, mais par contre, il constata sur sa personne des signes alarmants. Il alla consulter un médecin qui lui annonça qu’il avait contracté la syphilis.

Rencontrant son copain, M. Petipas le mit au courant de cette dernière catastrophe.

— Moi, comme je n’avais pas de femme ce soir-là et comme j’en voulais une, je suis allé au bordel, avoua cyniquement M. Péladeau. J’en ai choisi une jeune et jolie. J’ai passé une demi-heure avec elle et tout ce que cela m’a coûté, c’est deux piastres. Et, ajouta-t-il d’un ton satisfait, pas de suites, rien.