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la question était d’avoir pour soi le pays ; le peu de soldats qu’on tenait sous les drapeaux n’y pouvait rien contre le vœu national. Jamais, du reste, l’armée n’a été populaire en Angleterre, et ce n’est vraiment que depuis la guerre contre Napoléon, que l’opinion s’est réconciliée avec cette institution. L’esprit de la nation est tout civil, comme en France il a été longtemps tout militaire, ce qui suffirait pour expliquer les vicissitudes de la liberté dans les deux États. Ce n’est pas que nos voisins soient moins jaloux de leur grandeur nationale ; mais ils savent que la force de l’Angleterre est dans ses vaisseaux ; et cette force tout extérieure, ils ne l’ignorent pas, ne peut jamais servir l’ambition d’un prince et se retourner contre le pays. C’est une défense contre l’ennemi ; ce ne peut jamais être une menace contre la liberté.

Ces idées passèrent l’Océan avec les premiers émigrants. Ils ne demandèrent pas à la mère patrie de les protéger, ils se défendirent eux-mêmes contre les Indiens, les Français et les Espagnols. Dans nos luttes avec les Anglais du nouveau monde, ce sont les milices provinciales qui nous firent le plus de mal. C’est à leur tête et contre nous que se distingua Washington ; ce sont elles enfin qui soutinrent la guerre de la révolution, et qui, aidées par nous, chassèrent les Anglais du continent. Les généraux de la guerre de l’indépendance étaient des avocats, des fermiers, des forgerons, et