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la gardienne du phare

Il n’en fut rien cependant ; elle atteignit la barrière sans être molestée, avec ses doigts tremblants, elle l’ouvrit et mit le pied sur le trottoir : elle était libre !!…

Alors, elle eut envie de courir afin de mettre le plus de distance possible entre elle et la prison ; mais elle se rappela à temps qu’elle personnifiait la vieille Hermance… Ce fut donc sans précipitation, en s’appuyant sur le bâton de la vieille femme, qu’elle parcourut la ville. Plusieurs lui lancèrent un « bonsoir, la mère », — « Bonsoir », répondait Claire, d’une voix qu’étouffait le foulard dont elle s’était enveloppée la figure presqu’en entier.

Enfin, voici la campagne et bientôt, l’obscurité tombera… Claire pénétra dans un petit bois, à droite de la route, elle s’assit sur un tronc d’arbre renversé : elle n’en pouvait plus. Les émotions par lesquelles elle venait de passer l’avaient épuisée.

Claire resta près d’une heure dans le petit bois à se reposer, puis elle reprit la route. Il y avait plusieurs milles à parcourir avant d’atteindre le port de N…, où elle espérait pouvoir trouver un bateau en partance.

CHAPITRE XI

Le roman de Claire

Ce n’est que quand il fit nuit que Claire se décida à revêtir le costume de matelot que la prévoyante Hermance avait mis dans le panier. Mais d’abord, il lui restait une chose à faire, une chose qui lui coûtait assurément. Elle prit les ciseaux et coupa ses longs cheveux blonds qu’elle enveloppa dans un journal et qu’elle déposa dans le fond du panier. Ensuite, elle revêtit le costume de matelot qui était en toile blanche avec collet et parements bleus. Un béret était aussi dans le panier, mais Claire résolut d’attendre au jour pour s’en coiffer ; le manteau et le capuchon valaient mieux pour le moment.