Page:Lacordaire - Œuvres du R.P. Henri-Dominique Lacordaire, tome 1 - Vie de Saint-Dominique.djvu/80

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et en bien des lieux où le mal n’était pas si profond, il était encore grand. Le saint-siège, quoique troublé lui-même par les schismes qu’avait fomentés et soutenus contre lui l’empereur Frédéric 1er, n’avait cessé d’apporter les remèdes à de si graves désordres : il leur avait opposé trois conciles œcuméniques en cinquante-six ans, mais sans pouvoir réaliser qu’imparfaitement une réforme qu’étaient pourtant si dignes d’obtenir les illustres pontifes qui naissaient presque sans interruption des cendres de Grégoire VII.

Un jour, vers 1160, un riche habitant de Lyon, nommé Pierre Valdo, vit un de ses concitoyens frappé de la foudre à ses côtés. Cet accident le fit réfléchir; il distribua ses biens aux pauvres, et se consacra tout entier au service de Dieu. Comme la réforme de l’Église préoccupait les esprits, il lui fut aisé, par son dévouement même, de croire qu’il était appelé à cette mission, et il réunit un certain nombre d’hommes auxquels il persuada d’embrasser avec lui une vie apostolique. De combien peu diffèrent souvent les pensées qui font les grands hommes, et celles qui ne font que les perturbateurs publics! Si Pierre Valdo eût eu plus de vertu et de génie, il eût été saint Dominique ou saint François d’Assise. Mais il succomba à une tentation qui a perdu dans tous les temps des hommes d’une assez haute intelligence. Il crut impossible de sauver l’Église par l’Église. Il déclara que là véritable épouse de Jésus-Christ avait défailli sous Constantin, en acceptant