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pitait de plus en plus. Et comme si cette heureuse résolution ne devait avoir que des conséquences bienfaisantes, l’Oncle Tom fut délivré, ses persécuteurs s’enrichirent ; seuls, les traitants, marchands d’une propriété illusoire, virent avec regret la déchéance de leur commerce fructueux.

Un double enseignement découle pour nous de ce précédent fameux. D’abord, les propriétaires à perpétuité y puiseront la leçon de sagesse qu’elle contient et qui consiste à ne point s’exagérer par anticipation les conséquences d’une transformation sociale quelconque, surtout quand il s’agit de réparer une injustice éclatante ou, comme dit Montesquieu, « de restituer contre un accord qui contient la lésion la plus énorme de toutes ». Qui nous dit en effet que les propriétaires d’aujourd’hui ne trouveront pas une compensation considérable à un abandon très lointain dans l’avantage d’échapper à toute obligation pécuniaire immédiate et de voir leurs impôts notablement diminués pendant soixante-dix ans ?

Mais l’enseignement le plus précieux que nous apporte l’aventure américaine, c’est qu’avec « du temps, de la mesure, des tempéraments », comme le conseille Letourneau, on eût pu épargner la vie de 600.000 hommes et économiser quinze milliards de dollars.

En effet, quelques années plus tard, en 1871, le Brésil abolissait l’esclavage sans révolution

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