Page:Laffitte - Le grand malaise des sociétés modernes et son unique remède.djvu/137

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culture n’a peut-être qu’un bras, mais il est long.

Par bonne fortune, elle a aussi un cerveau, plein de bon sens, et riche en souvenirs. Le paysan est encore meurtri des siècles d’une servitude pire que l’esclavage, puisque pour y échapper les vilains se jetaient dans le servage. L’histoire du cultivateur, c’est-à-dire du seul contribuable du bon vieux temps, est la navrante chronique des vexations que lui faisaient subir les exigences fiscales ; tailles, redevances, amenaient des exactions de toutes sortes. Ce long martyrologe s’étend de la conquête de Jules César jusqu’à la Révolution.

Sous la domination romaine l’impôt ruinait et désolait les campagnes. Des charges intolérables, excessives, souvent plus élevées que le produit des terres imposées, étaient accrues par le privilège. Le despotisme avait besoin de soutiens intéressés qu’il obtenait en multipliant les exemptions ; des classes entières d’employés, de professions, de familles, tous les ecclésiastiques et tous les militaires, un nombre immense de favoris et de courtisans sont exonérés de l’impôt.

Le petit possesseur de biens ruraux, l’habitant des campagnes resta seul soumis aux terribles exactions du fisc ; là aucun privilège n’arrêtait son action : le malheureux était pressuré à loisir ; les prisons regorgeaient de con-

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