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COUCHANT D’HIVER


au Bois.


Quel couchant douloureux nous avons eu ce soir !
Dans les arbres pleurait un vent de désespoir,
Abattant du bois mort dans les feuilles rouillées.
À travers le lacis des branches dépouillées
Dont l’eau-forte sabrait le ciel bleu-clair et froid,
Solitaire et navrant, descendait l’astre-roi.
Ô Soleil ! l’autre été, magnifique en ta gloire,
Tu sombrais, radieux comme un grand Saint-Ciboire,
Incendiant l’azur ! À présent, nous voyons
Un disque safrané, malade, sans rayons,
Qui meurt à l’horizon balayé de cinabre,
Tout seul, dans un décor poitrinaire et macabre,
Colorant faiblement les nuages frileux
En blanc morne et livide, en verdâtre fielleux,