Page:Laforgue - Moralités légendaires.djvu/129

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raides pins, aux troncs nus d’un ton de chair saumoné, n’éployant que très haut, très haut leurs poussiéreux parasols horizontaux. Les barres des rayons du soleil se posaient entre ces troncs avec la même douceur tranquille qu’entre les piliers de quelque chapelle claustrale à soupiraux grillés. Une brise de mer venait à passer dans ces futaies suprêmes, étrange rumeur lointaine d’un express dans la nuit. Puis le silence des grandes altitudes se rétablissait, étant chez lui. Tout près, oh ! quelque part, un bulbul dégorgeait des garulements distingués ; bien loin, un autre lui répondait, comme chez eux, en leur volière séculièrement dynastique. Et on allait, supputant l’épaisseur de ce sol artificiel, feutré des feuilles mortes et des couches d’aiguilles de pin de mille antans, qui logeait ainsi à l’aise les racines de ces pins si patriarches ! Puis, des abîmes de pelouses, des dévalements bien gazonnés provoquant un rêve de kermesses faunesques ; et de stagnantes pièces d’eau où s’enlisaient d’ennui et d’ans des cygnes porteurs de boucles d’oreilles vraiment trop lourdes pour leurs cous fuselés ; et maints décamérons de statues polychromes, en rupture de piédestaux, dans des poses d’une surprenante... noblesse.

Enfin, le clos aux gazelles faisait transition, sans autre prétention d’ailleurs, entre les vergers et la Ménagerie et l’Aquarium.

Les fauves ne daignèrent point déclore leur paupière ; les éléphants se balançaient avec de rudes frou-frous de crépi, mais les idées ailleurs ; les girafes, malgré la douceur café au lait de leurs robes, parurent exagérées, s’obstinant à