Page:Lamarck - Discours (1806).djvu/7

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dans ces énormes listes, deviennent très-difficiles à retrouver, parce que les objets maintenant ne sont la plupart déterminés que par des caractères que nos sens peuvent à peine saisir.

Qui de vous pourroit former le projet de consumer son temps, et de fatiguer sa mémoire en s’efforçant de connoître et de pouvoir nommer au premier aspect cette multitude d’espèces que présentent dans chaque partie de l’histoire naturelle nos classifications diverses ! Espérons que les naturalistes sentiront un jour la nécessité de convenir de quelque principe pour limiter la détermination de ce qu’ils nomment espèce, et même celle de leurs genres.

En attendant, souvenons-nous que rien de tout cela n’est dans la nature ; qu’elle ne connoît ni classes, ni ordres, ni genres, ni espèces, malgré le fondement que paroissent leur donner les portions de la série naturelle que nous offrent nos collections ; et que parmi les corps organisés ou vivans, il n’y a réellement que des individus, et des races diverses qui se nuancent dans tous les degrés de l’organisation.

Contentons nous donc de consulter dans les ouvrages qui les contiennent, les nombreuses observations des naturalistes, parce qu’elles sont, ainsi que les objets mêmes qui en furent le sujet, les véritables matériaux de nos études; mais prenons garde à l’emploi que nous devons faire de ces matériaux et aux idées qu’ils peuvent nous inspirer; car c’est uniquement sur ces objets que portent les considérations que je crois devoir mettre sous vos yeux.

Lorsque vous distinguerez, relativement à l’histoire naturelle, les travaux qui ont eu pour objet de préparer des matériaux pour la science, des faits et des observations qui appartiennent à la science elle-même, vous sentirez que, dans ce cours, je ne dois pas avoir en vue de vous mettre à portée de former vous-mêmes de nouvelles variations dans les classifications et dans les genres, ni de fixer votre choix sur telle de ces classifications arbitraires ; mais que je dois diriger votre attention et vos études vers les objets essentiels à la science, et en même temps vers cette masse de principes et de loix qui constituent sa philosophie, afin de vous procurer, au moins sur cette branche particulière de la science qui va nous occuper, les connoissances qui intéressent véritablement le naturaliste.

Déjà vous appercevez que tout ce qui concerne les rapports qu’ont entr’elles les diverses productions de la nature, fait une partie très-importante des objets que nous devons avoir en vue, la connoissance de ces rapports étant une des bases de la philosophie de la science.