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HOMÈRE.

noyau natal était dans les rochers de l’Épire et de la Macédoine ; mais la rudesse du montagnard, l’esprit d’aventure du marin, la douceur de l’Asiatique, la religion de l’Égyptien, la pensée de l’Indien, la mobilité du Perse, étaient si bien fondus dans leur physionomie physique et dans leur génie multiple, que ce peuple était par sa beauté, son héroïsme, sa grâce, son caractère à la fois entreprenant et flexible, comme un résumé de tous les peuples. Les forêts de l’Europe lui avaient donné leurs mœurs héroïques et sauvages, l’Égypte ses prêtres et ses divinités, les Phéniciens leur alphabet, les Perses et les Lydiens leurs arts et leur poésie, les Crétois leur Olympe et leurs lois, les Thraces leurs armes, les Hellènes leur navigation et leur fédération en tribus indépendantes, les Hindous leurs mystères et leurs allégories religieuses ; en sorte que leur ciel était une colonie de dieux, comme leurs continents et leurs îles étaient une colonie d’hommes de toutes sources. Leurs aptitudes étaient aussi diverses que leurs origines.

La mer de l’archipel grec, c’est le lac Léman de l’Orient. Ayant pour contours ces golfes, ces anses, ces détroits qui s’insinuent entre les caps de ces terres dentelés, il baigne les côtes les plus après et les plus gracieuses tour à tour, et semble avoir été creusé pour amollir le choc entre les deux continents où Byzance s’assoit indécise sur les deux rivages. Les voiles, aussi multipliées que les oiseaux de la mer, naviguent sans cesse d’une île à l’autre, et de l’Afrique à l’Asie, et de l’Asie a l’Europe, comme des essaims d’une même famille qui vont s’entre-visiter au printemps sur leurs divers rochers.

Le climat de cette contrée montagneuse et maritime est aussi varié que ses sites et aussi tempéré que sa latitude. Depuis les neiges éternelles de la Thessalie jusqu’à l’été perpétuel des vallées de la Lydie et jusqu’à la fraîche ventilation des îles, toutes les rigueurs, toutes les chaleurs et