Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 34.djvu/154

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
CÉSAR

(AN DE ROME 710)



Soyons sans pitié pour la gloire, cette grande corruptrice du jugement humain, lorsqu’elle n’est pas le reflet de la vraie vertu. Telle est la première réflexion qui se présente quand, après avoir étudié avec l’impartialité de la distance, le génie, les circonstances, l’époque, la patrie, les exploits, la politique de César, on entreprend de peindre le plus accompli, le plus aimable et le plus dépravé des Romains et peut-être des hommes.

Mais il faut comprendre Rome pour comprendre César.

Le principe de ce qu’on a appelé la république romaine, dans des siècles où le mot république signifiait seulement l’État, n’était ni le juste ni l’honnête : c’était le patriotisme.

Le patriotisme se confond quelquefois avec le juste et l’honnête, quand il se borne à aimer, à défendre, à conserver la patrie, c’est-à-dire cette portion héréditaire de sol, patrimoine de la portion de famille humaine qu’on appelle une nation. Mais le patriotisme ambitieux, envahisseur et insatiable, qui ne reconnaît que son intérêt personnel pour droit dans le monde, qui méprise et qui violente les autres droits de nationalités, égaux chez tous les hommes, et qui se fait de ces violences une gloire inique