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CÉSAR.

ne s’arrêtèrent qu’au Rhin, éloigné d’environ cinq milles du champ de bataille. Tout ce qui ne put passer le fleuve en barque ou à la nage fut massacré par la cavalerie romaine. Il resta, selon Plutarque, quatre-vingt mille morts sur la place. Arioviste, perdant à la fois, dans la déroute de son armée, ses deux femmes et ses deux filles, alla mourir de désespoir en Germanie.

Le Gaulois qui avait été député par César était emmené chargé de chaînes par ses gardiens fugitifs. César le retrouva tout à coup en poursuivant l’ennemi. « Cette rencontre ne lui fit pas moins de plaisir que la victoire même, dit-il dans ses Commentaires, car il retrouvait l’homme le plus estimable de toute la province, son commensal, son hôte, qu’il arrachait des mains des ennemis ; et la fortune, en le lui rendant, lui permettait de jouir pleinement d’un aussi grand succès. Le Gaulois lui dit qu’il avait vu trois fois jeter le sort pour décider s’il serait livré aux flammes ou si son supplice serait différé, et que trois fois le hasard l’avait sauvé. »

À la nouvelle de cette victoire, les cent cantons des Suèves qui arrivaient déjà sur les bords du Rhin reprirent avec effroi la route de leurs forêts, et les habitants de la rive les poursuivirent et leur tuèrent beaucoup de monde.

César avait terminé ces deux grandes guerres en une seule campagne. Il emmena ses troupes en quartier d’hiver chez les Séquanes, et, les laissant sous le commandement de Labiénus, il partit pour aller tenir l’assemblée annuelle dans la Gaule cisalpine.

L’enthousiasme des Gaulois pour le vainqueur égala d’abord celui des Romains ; mais, lorsqu’on vit qu’il ne ramenait point avec lui en Italie ses légions victorieuses, qu’elles occupaient la Gaule comme un pays conquis, que les agents de Rome s’emparaient de toute l’administration dans l’intérieur des villes, l’abattement succéda à la recon-