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CÉSAR.

forçait de couper les vivres aux Romains, mais il évitait toujours la bataille. Cinq jours de suite, César tira ses légions de son camp et les disposa pour le combat ; mais Arioviste retint constamment son infanterie derrière ses lignes.

Dans une escarmouche où les Germains n’engagèrent que leur cavalerie, il y eut beaucoup de blessés de part et d’autre. Comme le général romain s’enquérait auprès des prisonniers pourquoi Arioviste ne voulait pas combattre, il apprit que, suivant la coutume des Germains, l’ennemi avait consulté les devineresses sacrées s’il fallait ou non livrer bataille, et que les prêtresses, qui prétendaient connaître l’avenir par le bruit des eaux, par les tourbillons que les courants font dans les rivières, avaient défendu à l’ennemi de combattre avant la nouvelle lune.

César crut le moment favorable pour attaquer, il marcha aux ennemis. À l’approche des légions, les Germains, forcés de combattre, sortirent de leur camp et se rangèrent par nations. Le choc fut si violent des deux parts, que ni les uns ni les autres ne purent faire usage des javelots ; on se battit corps à corps avec le glaive. Mais les Germains, ayant promptement formé leur phalange accoutumée, soutinrent avec fermeté l’effort de l’infanterie romaine. « On vit alors, dit César, les légionnaires s’élancer sur la voûte des boucliers qui couvrait cette phalange, les arracher avec leurs mains, les briser à grands coups d’épée et égorger l’ennemi, dont ils foulaient la tête sous leurs pieds. »

César en personne culbuta l’aile gauche des Germains, mais leur aile droite fit plier la gauche des Romains, et elle l’accablait, quand le lieutenant Crassus, commandant la réserve, lança la troisième ligne, jusqu’alors immobile, pour soutenir les autres légions. Enfoncées de toutes parts, les troupes d’Arioviste se débandèrent, prirent la fuite, et