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CICÉRON.

commença par détacher Antonius, le moins dangereux de ses deux rivaux, homme sans caractère, en lui promettant de servir son ambition, qui n’était que de la vanité, de l’accepter pour collègue au consulat, et de lui laisser les grands gouvernements de l’Italie hors de Rome. Ayant décomposé ainsi la brigue de ses adversaires, il combattit si vivement la politique plébéienne et turbulente de Catilina devant le sénat, que l’aristocratie, flattée de rencontrer un tel soutien, et le peuple, jaloux de s’assurer une telle éloquence, le nommèrent, non au scrutin, mais d’acclamation, consul avec Antonius. Il tint parole à son collègue, et lui fit donner ce qu’il désirait, le gouvernement de l’Italie. Quant à lui, il resta à Rome pour préserver la république des agitations et des subversions qui menaçaient tous les jours Rome pendant l’absence de Pompée, alors en Asie.

Ces circonstances suprêmes ne tardèrent pas a éclater. Indépendamment des grandes factions militaires dont nous avons parlé, factions représentées dans Marius, dans Sylla, dans Pompée, et bientôt après dans César ; indépendamment aussi des factions permanentes des patriciens et des plébéiens qui déchiraient la république depuis quelques années, il y avait à Rome une faction de l’anarchie, de la démagogie et du crime, qui couvait sous toutes les autres, et qui n’attendait, pour les renverser et les submerger toutes dans leur propre sang, que l’occasion d’un trouble civil ou d’une faiblesse du gouvernement. Les éléments de cette faction impie, qui bouillonne toujours dans la lie des sociétés vieillies et malades, étaient d’abord la populace, écume du peuple qui s’imprègne et qui se corrompt de tous les vices du temps, et qui flotte à la surface des grandes villes au vent de toutes les séditions. C’étaient ensuite les affranchis, les prolétaires et les esclaves, rejetés par des lois jalouses en dehors des droits des citoyens, et toujours