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notes.

pouvait porter parmi eux le germe de ma maladie : ils se déterminèrent à porter des plaintes au commandant, qui ordonna que mon chien fût tué sur-le-champ. Des soldats, accompagnés de quelques habitants, vinrent aussitôt chez moi pour exécuter cet ordre cruel : ils lui passèrent une corde au cou en ma présence, et l’entraînèrent. Lorsqu’il fut à la porte du jardin, je ne pus m’empêcher de le regarder encore une fois : je le vis tourner ses yeux vers moi pour me demander un secours que je ne pouvais lui donner. On voulait le noyer dans la Doire ; mais la population, qui l’attendait en dehors, l’assomma à coups de pierres. J’entendis ses cris, et je rentrai dans la tour plus mort que vif ; mes genoux tremblants ne pouvaient me soutenir. Je me jetai sur mon lit dans un état impossible à décrire ; ma douleur ne me permit de voir dans cet ordre juste, mais sévère, qu’une barbarie aussi atroce qu’inutile ; et quoique j’aie honte aujourd’hui du sentiment qui m’animait alors, je ne puis encore y penser de sang-froid. Je passai toute la journée dans la plus grande agitation. C’était le dernier être vivant qu’on venait d’arracher d’auprès de moi, et ce nouveau coup avait rouvert toutes les plaies de mon cœur. »




NOTE NEUVIÈME

(NEUVIÈME ÉPOQUE. — Page 373.)

Et je prie, et je pleure, et j’espère, et je sens
L’eau couler dans mon cœur aride, et je descends,
Dans mon jardin trempé par les froides ondées,
Visiter un moment mes plantes inondées.

La prière que, dans ma pensée, je posais sur les lèvres de Jocelyn, j’ai tenté de l’exprimer et de la formuler ailleurs. Ce n’est qu’un balbutiement de l’âme, mais accentué et divinisé par un écho de l’Évangile :

PATER

Ô Père, source et fin de toute créature,
Dont le temple est partout où s’étend la nature,
Dont la présence creuse et comble l’infini,
Que ton nom soit partout dans toute âme béni !