Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 7.djvu/167

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inévitable ; ils y serviront eux-mêmes. Après cela, on repoussera leurs tentes plus loin dans le désert, qui est leur seule patrie ; on les attirera peu à peu à une civilisation plus douce, dont ils n’ont pas eu l’exemple autour d’eux.

Nous nous levâmes avec le soleil, dont les premiers rayons frappaient sur les temples de Balbek, et donnaient à ces mystérieuses ruines cet éclat d’éternelle jeunesse que la nature sait rendre à son gré, même à ce que le temps a détruit. Après un court déjeuner, nous allâmes toucher de la main ce que nous n’avions encore touché que de l’œil ; nous approchâmes lentement de la colline artificielle, pour bien embrasser du regard les différentes masses d’architecture qui la composent ; nous arrivâmes bientôt, par la partie du nord, sous l’ombre même des murailles gigantesques qui, de ce côté, enveloppent les ruines : — un beau ruisseau, répandu hors de son lit de granit, courait sous nos pieds, et formait, çà et là, de petits lacs d’eau courante et limpide qui murmurait et écumait autour des énormes pierres tombées du haut des murailles, et des sculptures ensevelies dans le lit du ruisseau. Nous passâmes le torrent de Balbek à l’aide de ces ponts que le temps y a jetés, et nous montâmes, par une brèche étroite et escarpée, jusqu’à la terrasse qui enveloppait ces murs : à chaque pas, à chaque pierre que nos mains touchaient, que nos regards mesuraient, notre admiration et notre étonnement nous arrachaient une exclamation de surprise et de merveille. Chacun des moellons de cette muraille d’enceinte avait au moins huit à dix pieds de longueur, sur cinq à six de largeur et autant de hauteur. Ces blocs, énormes pour la main de l’homme, reposent sans ciment l’un sur l’autre, et