Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 7.djvu/269

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Une très-belle Arabe, extrêmement parée, vint rendre visite à ma femme dans le caravansérai ; nous lui fîmes quelques petits présents. Le lendemain, nous continuâmes à longer la côte et le pied des montagnes du Castravan, qui baignait partout dans la mer ; nous couchâmes sous nos tentes, dans un site admirable, à l’entrée du territoire de Tripoli. Le chemin quitte la côte, et tourne brusquement à droite ; il s’enfonce dans une vallée étroite, arrosée par un ruisseau ; à environ une lieue de la mer, la vallée se rétrécit tout à fait ; elle est entièrement fermée par un rocher de cent pieds d’élévation et de cinq à six cents pieds de circonférence : ce rocher, naturel ou taillé hors des flancs de la montagne qui le touche, porte à son sommet un château gothique parfaitement conservé, habitation des chacals et des aigles ; des escaliers taillés dans le roc vif s’élèvent à des terrasses successives, couvertes de tours et de murs crénelés jusqu’à la plate-forme supérieure, d’où s’élance un donjon percé de fenêtres en ogive ; la végétation s’est emparée partout du château, des murs, des créneaux ; d’immenses sycomores ont pris racine dans les salles, et élancent leurs larges têtes au-dessus des toits éboulés : les lianes retombant en touffes énormes, les lierres cramponnés aux fenêtres et aux portes, les lichens qui révèlent partout la pierre, donnent à ce beau monument du moyen âge l’apparence d’un château de mousse et de lierre. Une belle fontaine coule au pied du rocher, ombragée par trois des plus beaux arbres que l’on puisse voir ; ce sont des espèces d’ormes ; l’ombre d’un seul couvrait nos tentes, nos trente chevaux, et tous les groupes épars de nos Arabes.

Le lendemain, monté une côte rapide d’un terrain blanc