Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 7.djvu/420

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On aura une idée de la grandeur de cet édifice, quand on saura que le sultan nourrit toutes les personnes attachées à la cour et au palais, et que ce nombre de commensaux s’élève au moins à dix mille par jour. Un peu en avant du corps de logis des cuisines, est un charmant petit palais, entouré d’une galerie ou portique au rez-de-chaussée : c’est celui des pages ou icoglans du grand sérail : c’est là que le Grand Seigneur fait élever et instruire les fils des familles de sa cour, ou de jeunes esclaves destinés aux emplois du sérail ou de l’empire. Ce palais, qui a servi jadis de demeure aux sultans eux-mêmes, est décoré au dehors et au dedans avec une profusion de ciselures, de sculptures et de moulures dorées qui n’en exclut pas le bon goût. Les plafonds sont aussi riches que ceux des plus beaux palais de France ou d’Italie ; les planchers sont en mosaïques. Il est divisé en plusieurs salles, à peu près d’égale grandeur : ces salles sont obstruées à droite et à gauche par des niches et des stalles en bois sculpté, à peu près semblables aux stalles du plus beau travail, dans les chœurs de nos anciennes cathédrales. Chacune d’elles forme la chambre d’un icoglan : il y a au fond une estrade, où il replie ses coussins et ses tapis, et où ses vêtements sont suspendus ou serrés dans son coffre de bois doré : au-dessus de ces stalles règne une espèce de tribune également avancée, divisée, ornée et décorée, qui renferme autant de stalles que la salle inférieure. Le tout est éclairé par des coupoles ou par de petites fenêtres au sommet de l’édifice. Les jeunes icoglans, qui étaient tous d’anciens élèves de Rustem-Bey, le reçurent avec une joie et des démonstrations d’attachement touchantes. Un père, longtemps attendu, ne serait pas plus tendrement accueilli. L’excellent cœur de ces enfants le toucha jusqu’aux larmes ; j’étais ému