Page:Landry, Manuel d’économique, 1908.djvu/216

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pour autant que nous en pouvons connaître l’organisation — il paraîtrait que chaque couple recevait de l’État une maison et un lot de terre, à titre précaire ; les lots étaient remaniés très fréquemment, de façon à être toujours proportionnés aux besoins des familles. Il y avait, en dehors des terres réparties entre les sujets de l’Inca, des terres de la couronne et des terres du Soleil, dont la culture était assurée par des réquisitions. C’était aussi par réquisition que les travaux industriels étaient exécutés ; et le produit de ces travaux était distribué entre tous. Dans l’Égypte ancienne, le roi avait sur tout le territoire un droit éminent : les prêtres et les guerriers lui payaient une redevance annuelle pour la jouissance héréditaire qu’ils avaient de certaines terres ; quant au peuple, il ne pouvait que louer ces terres des prêtres et des guerriers, ou encore les terres du domaine royal[1].

La collectivité qui possède, d’autres fois, est la commune, le village. C’est ce qui se voit par exemple dans la dessa javanaise et dans le mir russe. La dessa javanaise laisse aux familles qui la composent la propriété de leur maison et de l’enclos attenant, tout en réglant la transmission de ces biens de façon à maintenir l’égalité entre tous ; elle est propriétaire, en revanche, des rizières irriguées, qui constituent à Java la principale richesse de la population indigène : et sur ces rizières sans doute des lois sont assignés pour un temps plus ou moins long à chaque chef de famille ; mais les travaux les plus importants de la culture sont exécutés par la collectivité. Le mir russe, lui aussi, laisse à chaque famille, comme bien héréditaire, sa maison et son jardin ; mais les autres terres sont propriété commune : ces terres sont alloties à des intervalles réguliers, en telle sorte que chaque famille ait des terres à cultiver à la fois dans la partie du territoire de la commune la plus voisine du village, dans la partie la plus éloignée et dans la zone intermédiaire[2].

La propriété collective du clan se rencontre dans toutes les sociétés primitives, semble-t-il, à un certain moment de leur évolution. Le clan d’ailleurs, souvent, se confond avec le village, les habitants d’un même village se regardant comme issus d’une même souche.

Il y a enfin ce qu’on peut appeler la famille associée. C’est une collectivité dont tous les membres sont unis ensemble par des liens de famille,

  1. Nous ne parlons pas ici des sociétés féodales du moyen âge. Dans ces sociétés, le souverain a un droit éminent sur toutes les terres ; et au-dessous de lui, il y a toute une hiérarchie de seigneurs dont chacun tient ses terres d’un seigneur plus haut placé à qui il rend l’hommage. Mais les rapports de suzeraineté et de vasselage sont des rapports politiques bien plutôt qu’économiques : il n’y a, pour s’en convaincre, qu’à considérer quelles sont les obligations réciproques du suzerain et du vassal.
  2. On sait que des mesures récentes prises par le gouvernement russe paraissent annoncer une destruction prochaine de l’organisation du mir.