Page:Landry, Manuel d’économique, 1908.djvu/426

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les troquer, qu’il faudra seulement aller chercher plus loin ou attendre plus longtemps celui avec qui l’on fera le troc ? Mais pour ce qui est du transport des biens dans l’espace, il n’est pas toujours possible, et lors qu’il est possible, il peut être si coûteux que l’opération du troc cesse d’être avantageuse. Et puis il faut savoir qu’il existe en tel endroit telle personne avec qui l’on pourra faire tel troc ; si l’on doit se mettre à la recherche de l’occasion, on sera exposé à y dépenser, en temps et en peine, plus qu’on n’en retirera finalement de profit. Quant à l’attente, elle pré sente des inconvénients aussi graves. Les biens dont on est abondamment pourvu et qu’on souhaiterait pouvoir troquer peuvent être des biens péris sables : la plupart des aliments, par exemple, ne se conservent que peu de temps. Et d’un autre coté le troc, s’il devient possible plus tard, peut cesser d’être avantageux : dans un moment de disette on céderait volontiers de certains biens qu’on a pour obtenir des subsistances ; mais il est indispensable, comme on le conçoit sans peine, que le troc ait lieu dans ce moment même.

En regard de ces obstacles qui rendent la conclusion du troc si difficile, il ne sera pas besoin de montrer longuement les facilités que l’emploi de la monnaie crée pour la circulation des biens. Il apparaît tout de suite que là où il existe une monnaie, un individu est quasiment assuré de pouvoir se procurer, avec les biens qu’il possède, tous les autres biens — en quantité plus ou moins grande —. Pour vendre ces biens qu’il possède, il pourra s’adresser à tous ceux qui les désirent ; il n’aura pas à se préoccuper de rechercher des gens qui possèdent ce qu’il désire lui-même, etc. Et une fois qu’il aura vendu — à un prix plus ou moins élevé sans doute — il pourra, l’argent étant désiré par tout le monde, acheter ce qui lui plaira. La monnaie est indispensable pour permettre la multiplication des échanges : sans elle, une économie mercantile est inconcevable.

Aujourd’hui, les échanges qui se l’ont sont presque tous des échanges monétaires. Et ainsi, étudier le mécanisme de l’échange, c’est autant dire étudier la monnaie.

2. Origine de la monnaie.

227. Comment la monnaie est apparue. — Quand on considère le fonctionnement présent de l’économie, on ne peut pas s’empêcher de remarquer certain caractère curieux que la monnaie présente. Chacun de nous cherche à se procurer de la monnaie — à gagner de l’argent, comme l’on dit — ; et si l’on désire la monnaie, ce n’est point à l’ordinaire pour elle-même, c’est parce qu’elle est désirée par tous les autres[1]. La monnaie

  1. Cf. Tarde, Psychologie économique, liv. I, chap. 6, i.