Page:Landry, Manuel d’économique, 1908.djvu/538

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

production et de la demande — auquel correspondra un prix tel que la production, toutes autres choses restant pareilles, demeurera stationnaire.

Cet équilibre de l’offre et de la demande que nous venons de définir, nous aurons à voir plus tard s’il représente l’état de choses le plus avantageux pour la société. En ce moment, nous voulons seulement examiner dans quelle mesure il est réalisé.

À la vérité, — nous l’avons déjà indiqué tantôt, mais il convient d’y revenir — l’équilibre de l’offre et de la demande ne saurait s’établir que d’une manière exceptionnelle.

Imaginons qu’à un moment donné la production d’une certaine marchandise soit trop abondante, autrement dit, que le prix de cette marchandise soit inférieur au prix normal. Un certain nombre de producteurs renonceront à produire cette marchandise, et de la sorte l’équilibre s’établira. Ce qui amène l’établissement de cet équilibre, c’est le fait que les entrepreneurs ne veulent pas produire à perte, ou avec un taux de a profit », comme l’on dit souvent, inférieur au taux normal ; c’est qu’ils cherchent toujours à employer leur activité, leurs capitaux de la façon la plus lucrative[1]. Mais il importe de voir que cette adaptation de la production aux conditions du marché ne saurait être instantanée : elle ne de viendra parfaite, peut-être, qu’après plusieurs oscillations du prix effectif autour du prix normal, et de toutes les façons, qu’au bout d’un temps plus ou moins long.

Or, dans la réalité, les conditions de la production — nous prenons cette expression dans son sens le plus large — sont perpétuellement changeantes. La courbe du coût varie soit par rapport à tous les producteurs — ainsi lorsque de nouveaux procédés de fabrication sont inventés — . soit par rapport à tels d’entre eux — ainsi lorsque de nouveaux moyens de transport sont créés — . Et la courbe de la demande varie aussi, par suite de l’accroissement ou de la diminution de la population, des changements qui ont lieu dans les goûts des consommateurs, etc. On aperçoit sans peine ce qui résultera de là. Les conditions du marché, aujourd’hui, sont telles et telles ? La production tendra à s’y adapter. Mais avant que l’adaptation soit parfaite, les conditions seront devenues autres. Et en définitive, ce n’est que par accident que le prix effectif coïncidera exactement avec le prix normal.

305. Les crises : leur nature. — Le défaut d’équilibre entre l’offre et la demande se traduit parfois par des phénomènes d’une grande importance, et auxquels il y a lieu de consacrer une étude spéciale : ce sont ces phénomènes que l’on désigne généralement par le nom de crises[2]. Ce

  1. Cf. Marshall, Principles, liv. VI, chap. 1, § 6.
  2. Sur la question des crises, on trouvera une orientation et des indications bibliographiques chez Herkner, Krisen (Handwörterbuch d. S., t. V) et chez Philip-