Page:Landry, Manuel d’économique, 1908.djvu/601

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D’autre part, il est intéressant de noter qu’on est fondé, en un certain sens, à soutenir que la rente contribue à déterminer les prix : elle y contribue d’une manière indirecte. Une terre, par exemple, donne une rente annuelle de 1.000 francs. Cela signifie que le plus avantageux des modes d’exploitation de cette terre, parmi ceux qu’on a vu jusqu’à présent la possibilité d’y pratiquer, laisse, tous frais de production payés, un excédent de produit de 1.000 francs. Mais voici qu’il vient au propriétaire l’idée de substituer à la culture qui se pratique une culture nouvelle. Veut-on sa voir si celle culture sera lucrative ? Dans le compte des frais qu’elle en traînera, on fera entrer la rente qu’actuellement la terre rapporte ; et l’on aura avantage ou non à entreprendre la culture nouvelle selon qu’elle donnera ou non un excédent par rapport aux frais ainsi calculés. En somme, on pourrait dire que la rente d’une terre fait partie du coût de production pour toutes ces denrées qui n’y sont pas produites ; par là elle limite la production de ces denrées ; et limitant la production, elle exerce une influence sur les prix.

L’opposition que nous disions tout à l’heure, néanmoins, demeure fondée. Le paiement de la rente, en effet, n’est pas nécessaire pour décider le propriétaire qui la perçoit à utiliser son fonds. Comme nous l’avons dit déjà, on enlèverait aux propriétaires des fonds leurs renies, que l’exploitation de ces fonds ne cesserait pas pour cela ; en d’autres termes, la rente est un revenu entièrement gratuit. Et de là il suit que la rente n’exercera aucune influence sur les prix — si du moins l’on considère les produits que donnent les fonds où la rente prend naissance, et non pas les produits que ces fonds pourraient donner —. Il en va autrement pour l’intérêt et le salaire. Ceux-ci ne sont pas des revenus purement gratuits. Beaucoup de capitalistes ne capitaliseraient pas, ou réduiraient leur capitalisation, si leurs capitaux ne devaient rien leur rapporter. Un travailleur qui s’abstenant de travailler, est assuré néanmoins de ne pas mourir de faim, ne travaillera qu’autant que son salaire le dédommagera de la diminution de bien-être que le travail représente pour lui. Qu’on enlève donc aux capitalistes, aux salariés, tout ou partie de leurs intérêts et de leurs salaires, la quantité des capitaux diminuera, et l’on travaillera moins : il s’ensuivra une réduction de la production, et les prix ne pourront pas rester les mêmes.

2. La rente agricole : comment elle se détermine.

345. Importance de la rente agricole. — La rente agricole est incontestablement la plus importante de toutes les rentes. Elle est la plus importante au point de vue des faits : car dans presque tous les pays elle dépasse de beaucoup, par le total auquel elle se monte, les autres renies.