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La vue que nous venons d’indiquer peut être acceptée. Mais il faut entendre ici l’expression « décroissance des rendements » dans un sens plus large que son sens propre. Cette décroissance des rendements peut se manifester de deux façons. Elle peut se manifester dans la courbe des rendements de tel ou tel fonds — et c’est là la véritable décroissance des rendements — : si, la rémunération de la dose de capital et de travail étant a, un fonds donne pour quelqu’une des doses qui y sont appliquées a , le propriétaire de ce fonds jouira d’une rente égale à . Mais elle peut résulter aussi du rapport des courbes des rendements des divers fonds : la rente en effet naîtra du moment que, l’exploitation des fonds étant poussée jusqu’à ce point où elle cesse d’être lucrative, des inégalités existeront, d’un fonds à l’autre, dans la productivité moyenne des dépenses de production.

344. Si la rente entre dans les prix. — On rencontre très souvent dans la littérature économique cette proposition que la rente n’entre pas dans les prix. Pour savoir ce que nous devons en penser, il nous faut bien voir dans quel sens on la prend, ou on peut la prendre.

Quand on dit que la rente n’entre pas dans les prix, on ne veut pas dire que la rente n’est pas incluse dans les prix : il est trop clair en effet — et cela découle de la définition même de la rente — que c’est le prix des biens produits par les fonds qui paie la rente de ces fonds, que la rente est pré levée sur ce prix. Ce qu’on veut dire, généralement, c’est que la rente n’influe pas sur les prix, qu’elle ne contribue pas à les déterminer, mais que ces prix se déterminent indépendamment d’elles, qu’elle en est simplement une conséquence. Et sur ce point on établit une opposition entre la rente d’une part, l’intérêt et le salaire de l’autre.

Nous indiquerons tout d’abord qu’il y a une façon de marquer l’opposition ci-dessus qui est inadmissible. On dit parfois que si les bénéficiaire : des rentes abandonnaient celles-ci, les prix des biens que produisent leurs fonds n’en seraient pas changés ; que si, en revanche, les capitalistes, les travailleurs renonçaient à percevoir leurs intérêts, leurs salaires, il s’en suivrait une diminution des prix. Mais cette deuxième assertion n’est pas vraie. Imaginons, par exemple, que les capitalistes consentent à ne plus loucher d’intérêts. Si l’on suppose que la même quantité de capitaux continue à être employée que l’on emploie aujourd’hui, ces capitaux seront affectés aux mêmes emplois — car ce sont les plus lucratifs —, les pro duits que l’on obtiendra grâce à eux seront les mêmes que l’on obtient déjà, et on les obtiendra en même quantité. Les prix de chaque chose resteront donc ce qu’ils sont ; et par là on est en droit de dire que l’intérêt est lui aussi, en un sens, une conséquence des prix. Plus brièvement, on peut représenter que ce sont les prix auxquels les produits du capital — comme aussi du travail — se vendent qui permettent de donner au capital — et au travail également — sa rémunération.