Page:Langevin - La Pensée et l'action, 1950.djvu/62

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Parlant des tentatives des idéalistes pour exploiter cette crise, il écrit[1] :

L'essence de la crise de la physique contemporaine consiste dans le bouleversement des vieilles lois et des principes fondamentaux, dans le rejet de la vérité objective existant en dehors de la conscience, c'est-à-dire dans la substitution de l'idéalisme et de l'agnosticisme au matérialisme. « La matière s'est évanouie » : on peut exprimer en ces mots la difficulté fondamentale, typique à l'égard de certaines questions particulières, qui a suscité cette crise.


Dans ce nouveau combat que doivent mener les matérialistes pour défendre la science, Henri Poincaré, "grand physicien et mince philosophe", écrit Lénine[2] a été fortement influencé par le courant néo-positiviste de l'Autrichien Mach et des empiriocriticistes, pour qui les principes de la physique « ne sont pas des copies, des reproductions de la nature, les images des choses extérieures par rapport à la conscience de l'homme, mais les produits de cette conscience »[3].

Langevin, au contraire, se rangeait parmi les physiciens qui continuaient à affirmer la réalité objective de la matière et pour qui les dernières théories conduisaient à ramener le monde physique tout entier à deux ou trois éléments au lieu de plusieurs dizaines, mettant ainsi en évidence « l'unité de la nature » suivant l'expression de Lénine[4].

On devine l'intérêt que durent présenter pour la genèse des notions nouvelles les discussions qu'eurent

  1. Matérialisme et empiriocriticisme, traduction française Éditions Sociales Internationales, Paris, 1928, p. 222.
  2. Loc. cit., p. 135.
  3. Loc. cit., p. 218. Sans aller toujours aussi loin qu'Ernst Mach, Henri Poincaré, par sa théorie de la "commodité" qui fait de la plus ou moins grande facilité d'application une sorte de critère de « vérité », a été conduit à un « conventionnalisme » idéaliste et même à une sorte de scepticisme stérilisant sur la "valeur de la science" qu'ont exploité à plaisir les philosophes réactionnaires.
  4. Loc. cit., p. 224.