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de la naissance des théories nouvelles. Un relativiste n’aurait aujourd’hui encore pas un mot à y reprendre, sauf, peut-être, le terme éther que Langevin continue à utiliser comme il le faisait dans la physique des électrons et auquel il ne renoncera définitivement qu’après le développement de la relativité générale[1].

On notera également dans les premières lignes que la notion de « synthèse » entre théories opposées qui jouait déjà un grand rôle dans la physique des électrons, se précise encore davantage dans le sens du matérialisme dialectique, puisque Langevin parle de la théorie nouvelle qui en absorbe d’autres « après être entrée en conflit avec elles ». Langevin, à cette époque, avait, au point de vue politique, une grande admiration pour Jean Jaurès[2]. Il est vraisemblable que si le grand tribun socialiste et le parti prolétarien dont il était l’un des dirigeants avaient attaché plus d’importance à la diffusion et à l’approfondissement de la théorie marxiste[3], la pensée de Langevin, au lieu de chercher des analogies parfois lointaines dans le darwinisme, comme dans le texte ci-après, aurait trouvé beaucoup plus tôt la forme dialectique qui lui convenait.


L’attention des physiciens s’est trouvée récemment ramenée vers les notions fondamentales de l’espace et du temps que de nouveaux faits expérimentaux les obligent à remanier ; rien ne peut mieux montrer l’origine empirique de ces

  1. Cf. à ce sujet la note de la p. 54.
  2. Cf. l’allocution de Georges Cogniot lors de l’hommage à Paul Langevin en 1945, à l’occasion de son 73e anniversaire : « Avant 1914, il est de ces intellectuels que la grande voix de Jaurès rassemble dans les meetings du Parti Socialiste, et ses fils aînés n’ont pas oublié ces dimanches de leur enfance où ils couraient avec lui jusqu’au Pré Saint-Gervais entendre la parole de feu tonnant sur les pentes au maigre gazon inondés d’auditeurs. », Hommage à Paul Langevin, 1945, p. 37.
  3. Ce n’est pas le lieu ici d’insister sur la faiblesse théorique du Parti Socialiste Unifié, en dépit des efforts de certains guesdistes. Notons simplement que le texte capital d’Engels contre Eugen Dühring, publié en Allemagne en 1878, n’a été traduit en français pour la première fois, et avec quelles réserves du traducteur, qu’en 1911 précisément.