Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/172

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mieux réglés, mieux conservés, pussent servir de modèle et devenir le point de départ d’une réforme. L’église wisigothique avait un centre à Tolède, un chef reconnu, le métropolitain de cette ville, un code disciplinaire unique, la collection Hispana ; la liturgie de Tolède était la liturgie de toute l’Espagne. L’église franque n’avait que des frontières : il lui manquait une capitale. L’épiscopat frank, en tant que le roi ou le pape n’en prenaient pas la direction, était un épiscopat acéphale. Chaque église avait son livre de canons, son usage liturgique ; nulle part de règle, mais l’anarchie la plus complète, un désordre qui eût été irrémédiable si les souverains carolingiens n’eussent point fait appel à la tradition et à l’autorité de l’église romaine.

L’intervention de Rome dans la réforme liturgique ne fut ni spontanée, ni très active. Les papes se bornèrent à envoyer des exemplaires de leurs livres liturgiques, sans trop s’inquiéter de l’usage qu’on en ferait. Les personnes que les rois franks, Pépin, Charlemagne et Louis le Pieux, chargèrent d’assurer l’exécution de la réforme liturgique, ne se crurent pas interdit de compléter les livres romains et même de les combiner avec ce qui, dans la liturgie gallicane, leur parut bon à conserver. De là naquit une liturgie composite, qui, propagée de la chapelle impériale dans toutes les églises de l’empire frank, finit par trouver le chemin de Rome et y supplanta peu à peu l’ancien usage. La liturgie romaine, depuis le onzième siècle au moins, n’est autre chose que la liturgie franque, telle que l’avaient compilée les Alcuin, les Hélisachar, les Amalaire. Il est même étrange que les anciens livres romains, ceux qui représentaient le pur usage romain jusqu’au neuvième siècle, aient été si bien éliminés par les autres qu’il n’en subsiste plus un seul exemplaire.

Il ne paraît pas que la réforme liturgique entreprise par les princes carolingiens ait été poussée jusqu’à Milan. Les particularités de l’usage milanais n’étaient pas inconnues en France ; mais cette grande église, mieux réglée sans doute que celles de la Gaule mérovingienne, sembla pouvoir se passer de réforme. Son usage, du reste, se rapprochait déjà beaucoup du rite romain. Il était protégé par le nom de saint Ambroise. Les