Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/186

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paraît, d’interrompre le cours de sa vie. Alors il entend parler du monastère de Saint-Riquier, célèbre par le nombre de ses religieux et par les miracles accomplis au tombeau du saint qui l’a fondé. Ce récit émeut Angilbert, et il ne pense plus qu’à faire sa retraite à Saint-Riquier, s’il recouvre la santé par l’intercession du puissant patron des pauvres moines. Mais le terrible Charles a fait consacrer ses amours avec Berthe : il est marié. Qu’importe ? S’il entre dans un monastère, sa femme, par ses ordres, suivra son exemple ; ils expieront ainsi, l’un et l’autre, les écarts de leur conduite. Telles étaient les pensées qu’Angilbert roulait dans son esprit, accommodant toute chose au pieux dessein qu’il avait formé, quand un bruit plein d’alarmes arriva jusqu’à lui. Les Danois avaient pénétré, par les embouchures de la Seine et de la Somme, dans tous les ports de la France maritime ; leurs innombrables navires emplissaient les fleuves, et les populations riveraines, épouvantées par l’irruption de ces farouches dévastateurs, refluaient vers les villes du centre, implorant le secours des gens de guerre. Angilbert n’a plus le loisir de songer au salut de son âme ; et, comme les troupes dont il pouvait disposer n’étaient pas capables de soutenir le choc des pirates, il se rend auprès du roi pour lui faire le récit des périls qui menacent une de ses provinces. Celui-ci n’a rien de plus pressé que de mettre sous les ordres d’Angilbert des forces considérables. C’était en l’année 791. A l’approche des Francs, les Danois prennent la fuite et il en est fait un grand carnage.

[Illustration : Dôme de la cathédrale d’Aix-la-Chapelle.]

Angilbert se rend alors à Saint-Riquier, remercie Dieu de la victoire qu’il a si facilement remportée, prend l’habit claustral, et l’impose à Berthe, qui vient, au mépris des canons, demeurer avec lui dans l’intérieur du monastère. Bientôt on le nomme abbé. Les suffrages ne se partagent pas ; ils se réunissent tous sur la tête d’un homme aussi puissant à la cour, aussi vaillant à la guerre. Va-t-il, suivant la règle, s’assujettir à la résidence et finir dans le recueillement une vie commencée par les agitations du siècle ? La règle n’avait pas été faite pour les religieux de cette qualité, ou bien on les dispensait aisément de la suivre. Déjà, étant simple moine, en 792, il avait été chargé de conduire