Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/279

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Que devint tout ce butin religieux ? Une partie considérable dut en être détournée, ainsi que nous le verrons plus loin ; mais le reste, à la suite des mesures prises, vers Pâques, par les chefs de l’armée, fut-il, avec les autres dépouilles de la ville, rapporté aux lieux désignés à cet effet — trois églises, suivant Villehardouin, un monastère, selon Clari — et mis en commun sous la garde de dix chevaliers et de dix Vénitiens ? Il n’y a guère lieu d’en douter en ce qui concerne les ornements d’église et les vases sacrés. Pour les reliques, il est certain qu’un grand nombre fut rapporté, mais il y a lieu de penser qu’elles furent dès l’origine séparées du reste du butin, car on voit qu’à l’exemple des croisés de 1097, ceux de 1204 confièrent au doyen des évêques, à Garnier de Trainel, évêque de Troyes, la charge qu’avait remplie à Jérusalem Arnould de Rohas, celle de procurator sanctarum reliquiarum, et que ce fut dans la maison habitée par Garnier que tous ces objets sacrés trouvèrent un asile.

Un premier partage du butin fut fait entre le 22 avril et le 9 mai. Il est à croire que les Vénitiens se remboursèrent de leur double créance contre les croisés et contre les Comnènes, et qu’une fois les sommes prélevées, il fut fait, comme le dit Sanudo, deux parts égales, l’une pour les Latins et l’autre pour Venise, parts dont un quart retourna, après le couronnement de Baudouin Ier, au trésor impérial : suivant Villehardouin, les trois huitièmes des croisés montèrent à la somme de 400 000 marcs (20 800 000 francs). Mais le maréchal de Champagne ne parle pas d’un second partage raconté en détail par Robert de Clari. Suivant Robert, ces deux premières répartitions n’auraient porté que sur le gros argent, la monnaie et la vaisselle massive ; quant aux joyaux, aux tissus d’or et de soie, ils auraient été, vers le mois d’août, furtivement enlevés par les chevaliers restés dans la ville pendant la campagne de Baudouin Ier contre Boniface de Monferrat, et divisés entre ces traîtres