Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/298

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jusque-là à peu près inabordable pour les Occidentaux, dans l’habillement ordinaire des riches. Ajoutez le satin, le samit ou velours. Les mots baphus, dibaphus et diaspre, diapré viennent de Constantinople (δἱβαφος, διἁσπορον) ; ils désignaient des étoffes de soie diversement teintes. Les tapis orientaux furent adoptés pour couvrir les planchers et tendre les murailles. On commença à en fabriquer en Europe d’après les modèles exotiques dont on s’appliqua à copier les couleurs et les motifs : lions, griffons, animaux fabuleux. On fit de même pour les belles broderies mêlées de fils d’or et de perles dont on décora les nappes d’autel. Saint Bernard tonnait déjà contre cet usage qui consistait à décorer avec toutes sortes de bêtes effrayantes les objets d’art destinés au service divin. Avec combien peu de succès ! c’est ce dont témoignent les parements d’autel du moyen âge qui sont parvenus jusqu’à nous, par exemple ceux de la cathédrale d’Halberstadt et ceux du trésor de la cathédrale d’Aix-la-Chapelle. Un style original ne naquit en Europe, pour la fabrication des tapis et des broderies, que bien avant dans le XIIIe siècle ; le nom de sarrasinois donné aux fabricants de tapis au temps de Philippe Auguste en est la preuve.

Les Croisades eurent une action très sensible sur les modes et sur les costumes, non seulement parce que les tailleurs eurent désormais à leur disposition de nouvelles étoffes (comme le camelot, étoffe en laine de chameau, fabriquée à Tripoli), mais parce qu’ils imitèrent les commodes et somptueux costumes de l’Orient : caftans, burnous, hoquetons. Il n’est pas jusqu’à l’habit, la joppe des archers et des chasseurs allemands, qu’on pourrait être tenté de prendre pour un vestige du vieux costume bavarois, qui ne provienne de l’arabe djobba à travers l’italien giuppa et le français jupe. — Les modes byzantines et musulmanes trouvèrent surtout accueil, comme il est naturel, auprès des nobles dames. De longs vêtements, légers et souples, avec des manches pendantes, firent fureur, et pour l’arrangement des cheveux on adopta toutes sortes d’artifices usités à Byzance. C’est à cette époque qu’il devint d’usage, pour les dames, de se farder avec du safran. Aux Vénitiens on doit la propagation des miroirs, qui remplacèrent les plaques de métal