Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/303

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préférences pour les croisades courtes. Les papes s’accommodaient, non sans regret, aux nécessités du temps, et les indulgences étaient aussi abondantes pour le Bourguignon croisé contre les Albigeois, ou pour le chevalier saxon croisé contre les Prussiens, qu’elles l’avaient été jadis pour Godefroi de Bouillon ou pour Frédéric Barberousse. « Le chemin n’est ni long ni difficile, disaient les prêcheurs de la croisade albigeoise, et copieuse est la récompense. » Ainsi parlaient les prêcheurs de la croisade prussienne.

Plusieurs armées marchèrent contre les Sarrasins du nord ; mais elles ne firent que passer, pillant, brûlant, puis livrant aux représailles des Prussiens exaspérés les églises chrétiennes. En 1224, les Barbares massacrent les chrétiens, détruisent les églises, passent la Vistule pour aller incendier le monastère d’Oliva, et la Drevenz pour aller ravager la Pologne. Ce pays était alors partagé entre les deux fils du roi Casimir ; l’un d’eux, Conrad, avait la Mazovie, et, voisin de la Prusse, il portait tout le poids d’une guerre qui n’avait jamais été si terrible. Ne se fiant plus à des secours irréguliers et dangereux, il se souvint que l’évêque de Livonie, en fondant un ordre chevaleresque, avait mis la croisade en permanence sur le sol païen, et il députa vers le grand maître des Teutoniques pour lui demander son aide.

Le grand maître à qui s’adressa Conrad était Hermann de Salza, le plus habile politique du XIIIe siècle, où il a été mêlé à toutes les grandes affaires. Dans ce temps de lutte sans merci entre l’empire et la papauté, où les deux chefs de la chrétienté se haïssaient mutuellement, le pape excommuniant l’empereur, l’empereur déposant le pape, l’un et l’autre se couvrant d’injures et se comparant qui à l’Antéchrist, qui aux plus vilaines bêtes de l’Apocalypse, Hermann demeura l’ami et même l’homme de confiance de Frédéric et de Grégoire IX. Il n’est pas prudent d’associer un pareil homme à une entreprise politique en lui offrant une part dans les bénéfices : s’il ne cherchait point à grossir cette part, à quoi servirait cette habileté ? Conrad de Mazovie et Christian d’Oliva espéraient sans doute que les Teutoniques feraient leur besogne moyennant quelque cession de territoire sur laquelle on reviendrait dans la suite, mais ils s’aperçurent qu’ils s’étaient