Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/304

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

trompés. Conrad offre à l’Ordre le pays de Culm, entre l’Ossa et la Drevenz, toujours disputé entre les Polonais et les Prussiens et qui alors était à conquérir. Hermann accepte, mais il demande à l’empereur de confirmer cette donation et d’y ajouter celle de la Prusse entière. L’empereur, en sa qualité de maître du monde, cède au grand maître et à ses successeurs l’antique droit de l’empire sur les montagnes, la plaine, les fleuves, les bois et la mer in partibus Prussiæ. Hermann demande la confirmation pontificale, et le pape, à son tour, lui donne cette terre qui appartenait à Dieu ; il fait de nouveau prêcher la croisade contre les infidèles, prescrivant aux chevaliers de combattre de la main droite et de la main gauche, munis de l’armure de Dieu, pour arracher la terre des mains des Prussiens, et ordonnant aux princes de secourir les Teutoniques. Après les premières victoires, il déclarera de nouveau la Prusse propriété de saint Pierre ; il la cédera de nouveau aux Teutoniques, de façon qu’ils la possèdent « librement et en toute propriété », et menacera quiconque les voudrait troubler dans cette possession « de la colère du Tout-Puissant et des bienheureux Pierre et Paul, ses apôtres ».

Quand tout fut en règle, en 1230, la guerre commença. La première fois que les Prussiens aperçurent dans les rangs des Polonais ces cavaliers vêtus du long manteau blanc sur lequel se détachait la croix noire, ils demandèrent à un de leurs prisonniers qui étaient ces hommes et d’où ils venaient. Le prisonnier, rapporte Pierre de Dusbourg, répondit : « Ce sont de pieux et preux chevaliers envoyés d’Allemagne par le seigneur pape pour combattre contre vous, jusqu’à ce que votre dure tête plie devant la sainte Église. » Les Prussiens rirent beaucoup de la prétention du seigneur pape. Les chevaliers n’étaient pas si gais. Le grand maître avait dit à Hermann Balke, en l’envoyant combattre les païens avec le titre de « maître de Prusse » : « Sois fort et robuste ; car c’est toi qui introduiras les fils d’Israël, c’est-à-dire tes frères, dans la terre promise. Dieu t’accompagnera ! » Mais cette terre promise parut triste aux chevaliers, quand ils l’aperçurent pour la première fois d’un château situé sur la rive gauche de la Vistule, non loin de Thorn, et qu’on appelait d’un joli