Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/345

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ment ce principe et s’en inspirait, devait passer, aux yeux des contemporains, pour le type même de la loyauté et la vivante image du droit.

Mais le trait le plus saillant de ce caractère chevaleresque, celui que Suger, dans son histoire, a mis en relief avec une préférence évidente et une singulière vigueur, c’est l’activité infatigable, la valeur bouillante que rien n’arrête, parfois aussi la folle témérité du soldat.

[Illustration : Monnaie de Louis VI.]

Louis le Gros, en effet, fut, avant tout, un homme de guerre. Son rôle militaire l’absorba tout entier jusqu’au jour où, la victoire lui ayant laissé peu de chose à faire et les infirmités le saisissant, il se vit obligé de prendre enfin le repos qu’il n’avait jamais connu. Encore ne cessa-t-il de combattre que peu de temps avant sa mort ; c’est seulement en 1135 qu’il alla brûler son dernier château. Depuis longtemps déjà ses forces le trahissaient ; son embonpoint, nous l’avons dit, lui interdisait l’usage du cheval, mais il mettait une énergie incroyable à vouloir conduire en personne les expéditions les plus fatigantes. Vainement ses amis l’engageaient à rester tranquille, à faire simplement son devoir de chef d’État. Il ne pouvait s’y résigner et affrontait, au grand préjudice de sa santé, des intempéries et des obstacles qui faisaient reculer les jeunes gens. Envahi par l’obésité, presque incapable de se mouvoir, désespéré de ne plus satisfaire au besoin d’activité qui le dévorait, il disait, en gémissant, à ses intimes : « Ah ! quelle misérable condition que la nôtre ; ne pouvoir jamais jouir en même temps de l’expérience et de la force ! Si j’avais su, étant jeune, si je pouvais, maintenant que je suis vieux, j’aurais dompté bien des empires. »


Ce regret peint l’homme tout entier. Jamais souverain du moyen âge ne paya plus directement et plus souvent de sa personne sur les champs de bataille. Louis le Gros, « athlète incomparable et gladiateur éminent », comme dit Suger, avait l’or-