Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/349

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Senlis fut remplacé par Gilbert de Garlande. Trois des grands offices sur cinq se trouvèrent alors dévolus en même temps à la même maison, fait unique dans l’histoire du palais capétien. En 1120, il se passa quelque chose de plus extraordinaire encore. La mort de Guillaume de Garlande amena la vacance du dapiférat. Pour empêcher que cette charge importante ne sortît de la famille, le chancelier Etienne se fit nommer lui-même sénéchal et cumula les deux fonctions, ce qui ne s’était jamais vu, ce qu’on ne revit plus après lui. Un homme d’Église devenu le chef suprême de l’armée ! Cette étrange situation, prolongée pendant sept ans, donna la mesure de la faiblesse du roi et de l’audace du favori.

L’ambition et la cupidité d’Étienne de Garlande ne connurent bientôt plus de limites. Comme chancelier et chapelain en chef, il se fit investir d’un grand nombre de bénéfices ecclésiastiques dans les églises et les abbayes qui dépendaient immédiatement de la couronne. On le vit, à la fois, chanoine d’Étampes, archidiacre de Notre-Dame de Paris, doyen de l’abbaye de Sainte-Geneviève, doyen de Saint-Samson et de Saint-Avit d’Orléans. Il voulut encore le décanat de l’église cathédrale d’Orléans ; pour le satisfaire, on donna l’évêché de Laon au doyen Hugue. Il essaya même plusieurs fois d’arriver à l’épiscopat. Le gouvernement capétien soutint pendant deux ans une lutte des plus vives contre le pape et les partisans de la réforme pour lui assurer le siège de Beauvais. Étienne fit aussi une tentative infructueuse sur celui de Paris. En 1114, à la mort de Geoffroi, évêque de Beauvais, il osa demander qu’on transférât dans cet évêché l’évêque de Paris, Galon, afin de se faire nommer à sa place. Encore prétendait-il, une fois investi de la dignité épiscopale, rester en possession de ses nombreux bénéfices. Cette fois, la mesure était comble ; le pape Pascal II refusa d’accueillir sa requête. Étienne n’en restait pas moins « le second personnage du royaume, celui dont la volonté régissait la France entière et qui paraissait moins servir le roi que le gouverner », suivant l’expression décisive du chroniqueur de Morigni.

Cette fortune insolente ne pouvait manquer d’exciter l’envie et de soulever la haine. Étienne s’était fait de nombreux ennemis