Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/372

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

artifices pour parvenir, à quelque prix que ce fût, et quelque peine qu’il dût lui en coûter, à s’emparer de ce nid dont la Normandie est si fière.

« Alors donc le roi donne l’ordre de creuser en terre un double fossé sur les pentes des collines et à travers les vallons (une ligne de contrevallation et de circonvallation), de telle sorte que toute l’enceinte de son camp soit comme enveloppée d’une barrière qui ne puisse être franchie, faisant, à l’aide de plus grands travaux, conduire ces fossés depuis le fleuve jusqu’au sommet de la montagne, qui s’élève vers les cieux, comme en mépris des remparts abaissés sous elle[1], et plaçant ces fossés à une assez grande distance des murailles (du château) pour qu’une flèche, lancée vigoureusement d’une double arbalète, ne puisse y atteindre qu’avec peine. Puis, entre ces deux fossés, le roi fait élever une tour de bois et quatorze autres ouvrages du même genre, tous tellement bien construits et d’une telle beauté que chacun d’eux pouvait servir d’ornement à une ville, et dispersés en outre de telle sorte qu’autant il y a de pieds de distance entre la première et la seconde tour, autant on en retrouve encore de la seconde à la troisième….

« Après avoir garni toutes ces tours de serviteurs et de nombreux chevaliers, le roi fait en outre occuper tous les espaces vides par ses troupes, et, sur toute la circonférence, disposant les sentinelles de telle sorte qu’elles veillent toujours, en alternant d’une station à l’autre ; ceux qui se trouvaient ainsi en dehors s’appliquèrent alors, selon l’usage des camps, à se construire des cabanes avec des branches d’arbres et de la paille sèche, afin de se mettre à l’abri de la pluie, des frimas et du froid, puisqu’ils devaient demeurer longtemps en ces lieux. Et, comme il n’y avait qu’un seul point par où l’on pût arriver vers les murailles (du château), en suivant un sentier tracé obliquement et qui formait

  1. Ce passage explique parfaitement l’assiette du camp de Philippe Auguste qui se trouvait en R (fig. 1), précisément au sommet de la colline qui domine la roche Gaillard et qui ne s’y réunit que par cette langue de terre dont nous avons parlé. On voit encore, d’ailleurs, les traces des deux fossés de contrevallation et de circonvallation creusés par le roi.